Une étape
Cela fait maintenant plus de trois semaines que nous rencontrons les gens, les jeunes et les moins jeunes, 3 semaines que nous vivons près d’eux. Et le tourbillon des idées a laissé place à une certaine mélancolie.
De ma petite expérience, je sais que c’est une étape dans le processus de création, je sais que j’ai quelques jours à passer avec cette enclume posée au milieu de mon jardin. Après la pluie de météorites formée par toutes les pistes qui ont plu comme par magie, après tous ces rêves que nous avons débutés sans les contraindre à livrer une fin, une nouvelle étape pointe son nez et pose un voile amère sur toutes ces pages de folie. A chaque fois que je commence à regarder ce cahier de contes illustrés avec les yeux légèrement plissés de celui qui, chez moi, s’occupe de l’organisation et des plannings, je vois les pages s’alourdir et les songes atterrir. La dernière fois, je m’étais profondément inquiété de cet état, j’avais cru que j’échouais.
Aujourd’hui, je traverse ce brouillard avec une certaine confiance. Ces dessins et ces mots insensés et beaux tombés devant une nouvelle réflexion cruellement cartésienne, ont pris les tons de projets infaisables, d’idées inabouties, parfois même de sordides égarements, mais cela ne devrait être que passager, un souffle froid avant métamorphose.
Quelques jours dans cette boue collante et lourde pour passer à la suite, pour se réveiller avec les solutions, se sentir porté par la magie des traducteurs de rêves. C’est un cap qu’il faut passer même si je n’en connais ni la valeur, ni la nécessité. Alors, je me traîne quelques jours entre ces murs épais cherchant la sortie. Je me persuade qu’il y en a une.
Hier soir, lors d’une réunion avec les adultes, j’ai demandé de l’aide au sujet de mots qui me tournaient autour sans vouloir livrer leurs secrets. Je pensais à la relation entre le vent omniprésent ici, et la pierre que leur évoque la France. Mon état second, second état de ma personne, état sérieux par excellence, m’empêchait de croire et donc de voir. Seule l’image d’un cerf volant en pierre m’était arrivée comme un relent d’une douce folie endormie.
J’ai demandé qu’ils me livrent leurs sensations sur le sujet. Il s’en est suivi un florilège d’images légères comme la brise et consistante comme la roche. La sortie du tunnel doit être devant moi, juste là, et ils creusent de toutes leurs forces pour laisser entrer la lumière.
Encore un cadeau, comme ces tomates sur la table, comme ces fruits de la passion posés dans notre sac, ces herbes fraîches devant la porte.
DUME